Les problématique RH face aux nouvelles composantes des services informatiques territoriaux.

Personnels en reclassement, emplois aidés et personnes en situation de handicap, comment gérer cette nouvelle composante des services informatiques territoriaux ?

Le succès de la mise en place d’un service informatique territorial repose sur la capacité à auditer les établissements membres du GHT et identifier les ressources informatiques présentes, les former en fonction de leurs souhaits d’évolution dans une organisation mutualisée (cf. article DSIH : http://www.dsih.fr/article/2365/mise-en-oeuvre-d-un-service-informatique-territorial.html).

Malgré ces efforts de rationalisation et de mutualisation, les GHT de taille moyenne, comme celui de l’Aube et du Sézannais, font hélas un autre constat : le manque de personnels pour mener à bien tous les chantiers et donc la nécessité de recruter.

Mais la situation économique des établissements de santé laisse peu de marge de manœuvre financière pour des recrutements. Et même si des initiatives locales, comme la création de groupements de coopérations sanitaires de moyens informatiques (cf. le GCS Santé Numérique du dit GHT) permet de générer des recettes annuelles de plusieurs dizaines de milliers d’euros (en réalisant des prestations pour des établissements médico-sociaux notamment), elles ne suffisent pas à créer des postes pérennes avec des profils d’agents opérationnels dès leur embauche.

Il faut donc envisager d’autres pistes pour créer des ressources aptes à accompagner la transition numérique hospitalière :

  • Les personnels en reclassement,
  • Les emplois aidés,
  • L'insertion sociale et professionnelle des personnes handicapées,
  • Les partenariats avec les structures d’enseignement supérieur et formation professionnelle.

La première piste est potentiellement la moins coûteuse pour l’établissement qui paie déjà ces agents (ex soignant dont l’état de santé ne leur permet plus d’exercer en services de soins par exemple, suite à un accident de travail et qui reste à son domicile, n’arrivant souvent pas à faire le deuil d’un métier qu’il a choisi pour aider les autres) et qui pourra les reconvertir en chef de projets informatiques hospitaliers, en consultants fonctionnels, en formateurs ou en opérateurs de prise d’appels du support informatique, moyennant une formation adaptée et un bon accompagnement (cf. article DSIH : http://www.dsih.fr/article/2322/competences-necessaires-a-la-mise-en-place-du-volet-si-d-un-ght.html).

La seconde piste s’appuie sur les multiples plans gouvernementaux d’aide au retour à l’emploi pour les chômeurs de longue durée ou les jeunes actifs, dont les établissements de santé ont pu bénéficier depuis une quinzaine d’années (connus sous le nom d’emplois aidés) et qui permettent d’employer d’une main d’œuvre motivée à un tarif très intéressant (leur salaire est financé à hauteur de 90% dans certaines conditions) sur une période déterminée, à condition de les former et de leur donner une véritable expérience professionnelle sur une période d’au moins un an. Le contrat est parfois renouvelable et les aides modulées. Certes, la démarche pourrait être qualifiée par « les bien-pensants » d’exploitation des plus faibles, mais dans la pratique, elle donne une véritable chance à des acteurs qui ont envie de retrouver une place dans le monde professionnel et pour qui de trop nombreuses portes se sont refermées à cause d’accidents de la vie. L’expérience est d’autant plus heureuse qu’elle débouche parfois sur une embauche pérenne, suite au départ à la retraite d’un agent (une place se libère, elle est budgétée, alors pourquoi ne pas en faire profiter un emploi aidé qui s’est parfaitement intégré à l’équipe et fait ses preuves). Une partie de l’équipe support informatique du GHT de l’Aube et du Sézannais a suivi ce parcours avec succès.

L’association pour l’insertion sociale et professionnelle des personnes handicapées (ADAPT) propose également une autre forme d’emplois aidés. Cette fois, les personnes concernées sont en situation de handicap et le partenariat avec l’établissement de santé s’accompagne à la fois de restriction (ne pas porter de lourdes charges par exemple) et d’un poste de travail adapté. Mais la motivation de ces acteurs professionnels est à la hauteur du service qu’ils rendent aux établissements de santé, sur des missions de support informatique, de développement, de formation et de gestion de projets. Là encore, je dispose de retour d’expérience positive avec des acteurs qui nous accompagnent depuis 2014 et qui ont progressivement augmenté leur temps de travail de 20 à 26 puis 35 heures par semaine, dans le respect de des personnes en situation de handicap mais aussi un véritable service en rendu à la communauté hospitalière.

Emplois aidés ou aides à la réinsertion des personnes en situation de handicap nous ont donc amenés à creuser une quatrième piste, celle de la formation professionnelle : des agents qui passent une semaine à l’école et trois semaines à nos côtés chaque mois pour apprendre le métier en conditions réelles, tout en nous permettant d’avoir une légère augmentation de notre effectif.

Si la gestion d’un service informatique territorial s’apparente de plus en plus à celle d’une petite entreprise, elle conserve, selon moi, une mission sociale indissociable de l’hôpital public et permet de véritables success-stories : je citerai pour illustration l’histoire de ce jeune travailleur handicapé qui intégra notre équipe comme technicien support en 2011, puis devint responsable support en 2014 à force de travail et de formation, avant de nous quitter mi-2016 pour intégrer un hôpital de Normandie, fort d’un CV, d’une expérience et d’une compétence qui rendirent son profil attractif. Avec le temps, tout le monde avait d’ailleurs oublié son handicap et son parcours, pour ne retenir que l’informaticien compétent à l’incroyable sens du service !

Michael-De-Block.
Directeur de l’Information numérique des Hôpitaux de Champagne Sud. Il a été, auparavant, chef de projet chez des éditeurs et intégrateurs de solutions informatiques pour les établissements de santé.

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